Devenir veuve avant l’âge

Article : Devenir veuve avant l’âge
Crédit: erinbetzk / Pixabay CC
12 août 2022

Devenir veuve avant l’âge

Jeune femme heureuse
Une jeune femme qui est entrain d’étirer un cache-nez, wirestock / freepik CC

Chère femme, tes éloges surpassent mon entendement malgré une viduité (état de celle qui est veuve ou de celui qui est veuf) précoce. Intelligente et belle, ta présence ne laisse pas indifférente.

Tel un nourrisson affolé par l’absence du sein, ton absence inquiète la famille.

Chère femme, dans ta tour d’ivoire, tu es convoitée. Une perle d’une beauté rare renfermée dans un moule. Une foule qui te désire, mais l’absence d’un seul la déprime.

Fragile à ses yeux, aucun mot ne trouve sens à l’expliquer. Des mots forts et puissants qu’elle clame à l’extérieur pour ainsi marquer son territoire.

Chère femme, tu supportes au delà de tes épaules et tes reins te font souffrir à chaque déplacement. Ton dos se courbe quand le poids des coutumes et des traditions t’assaille.

Chère femme, tant valorisée à une époque, les idées préconçues t’accablent et te relèguent à une place vide aujourd’hui.

Chère femme, ton identité se confond, ou si je peux le dire, disparaît dans l’ombre d’une autorité. La même qui autorise le néant dans ta vie, sans un moindre remord et avec insouciance. Le reflet de ces sentiments se traduit par une progéniture multiple, une compréhension absolue et un mutisme total.

Chère femme, humiliation et acceptation sont tes cachets quotidiens. Malheureusement, sans la moindre qualification en période de disette, tu fais la manche aux bords des feux tricolores pour ramener un bout de pain à la maison. Chère femme, tes enfants et toi mangez et vous reposez aux bords des voies en espérant avoir une pièce ou un billet d’un bon samaritain.*

Chère femme, ton corps attise la libido de certains regards, car l’odeur de ta faiblesse attire.

Chère femme, ton cri silencieux me pèse sur le coeur. Derrière cette image de femme forte, tes yeux trahissent la douleur de ton âme.

Chère femme, on t’aide. Mais jusqu’à quand cette aide persistera-t-elle donc ? Tout ce poids est vu et vécu avec tes enfants.

Chère femme, qui es-tu ? Celle que l’on interpelle pour prendre la parole alors que tu ne veux pas… La femme à qui on rappelle que la maison est vide en ton absence… Celle qui n’émerge de l’eau qu’après une viduité précoce ou à la dernière insulte… La mère qui est sensée inculquer une éducation digne d’Harvard, alors qu’elle ignore sa valeur dans les yeux de ses semblables… La fille qui est née pour être l’épouse, la mère, la grand-mère d’une génération qui brime ses droits et lui rappelle ses devoirs.

Chère femme, des fois mes larmes coulent pour toi quand je me rends compte de la grande dévalorisation faite de la jeunesse qui provient des femmes elles-mêmes. En effet, chère femme, je défends ta cause, mais tu es la première à rabaisser la jeune fille…

Chère femme, tu dois donc :

  • Enseigner à cette jeune fille à être forte, en lui épargnant ta propre souffrance. Montre à cette jeune fille le chemin à emprunter, mais ne sois pas un frein à son épanouissement.
  • Apprendre à cette jeune fille à rêver plus grand, et demain, elle sera une femme de vision.
  • Conseiller à cette jeune fille d’étudier, car une personne instruite et éduquée ne fait pas fuir le mariage.

En effet, tout le monde a besoin d’une personne sage et intelligente pour finir ses vieux jours. Valorise cette jeune fille pour qu’elle sache que son corps n’est pas une source de revenus ou un outil pour garder un partenaire de vie.

Même la polygamie n’empêche d’aller voir au-delà de l’union déjà scellée. Malgré une viduité précoce, tu dois incarner cette lumière attirante jusqu’à ton ascension chère femme. Car rien n’est neuf sous ce vieux soleil, et la lutte continuera toujours…

*Un burkinabé sur 20 était, en 2020, déplacé dans son propre pays. Ce chiffre est alarmant. « La majorité des personnes déplacées sont des femmes et des enfants, et leurs besoins sont énormes, surtout pendant la pandémie de COVID-19 qui a bouleversé une crise humanitaire déjà complexe et multidimensionnelle », a déclaré Abibatou Wane, chef de mission de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) au Burkina Faso.

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