22 septembre 2022

Femmes et littérature

L’affiche pour la première rencontre littéraire à Ouagadougou.

Les femmes représentent un rond-point incontournable dans la culture. Face à des faits de société, les femmes expriment leurs sentiments par des moyens qui sont propres à chacune d’elles. Certaines agissent en étant dans le feu de l’action. D’autres prennent la plume et écrivent pour susciter la révolte intérieure et lutter contre les injustices. Les femmes et la littérature partagent une histoire intrinsèque et je le constatai à nouveau lors de la première rencontre littéraire qui eut lieu à Ouagadougou, le 17 septembre 2022. A l’Institut français de Ouagadougou, des écrivaines de renom, à savoir Roukiata OUEDRAOGO, Monique ILBOUDO, Bernadette SANOU DAO, Mahoua S. BAKAYOKO et Laurence GAVRON, face à leur public, discutèrent au tour du thème : Femmes et littérature en Afrique de l’Ouest.

Elles ont su développer cette thématique en abordant d’autres questions sous différents angles, avec une touche personnelle.

La place de la littérature au sein d’un Sahel en crise

L’affiche illustrant les femmes qui ont pris part au panel sur le thème : femmes et littérature en Afrique de l’Ouest.

Plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest font face à une crise sécuritaire depuis quelques années. Cette crise entraîne non seulement le déplacement des populations, mais aussi la destruction du patrimoine culturel créé dans le temps. Pour elles, il appartient à tout un chacun de mener un combat pour préserver la culture. Les femmes et la littérature devront être présentes pour la restaurer après la crise.

Pour l’écrivaine Monique ILBOUDO, « Il s’agit de pouvoir faire de la culture une réflexion actuelle.« , car la crise passera. On ignore le temps exact, mais un jour la crise sécuritaire sera un souvenir lointain. En ce moment là, il faudrait que la culture soit ce rempart que les uns et les autres utiliseront pour faire face à leurs blessures et douleurs. « Les écrivains lucides sont ceux-là qui mènent un combat en prenant leurs plumes », dixit Mahoua S. BAKAYOKO. En effet, les écrivains et les écrivaines sont chargé.e.s, si je peux le dire, de prévenir certains maux de la société. Je constate que tout le monde voit, mais tout le monde n’est pas capable d’écrire pour susciter cette prise de conscience. Il les appartient donc de prendre la plume et d’écrire pour dénoncer des actes que les gouvernants font semblant de ne pas voir.

La littérature permet de faire le deuil des souffrances subies, parce que sur le support papier ou électronique, j’écris mes peines et mon ressenti et je me libère par la même occasion. En effet, il fallait que ça sorte et l’écriture est le meilleur moyen qui existe. C’est ce qu’affirme l’autrice Laurence GAVRON en soutenant que « La culture est cette bouée à laquelle il faut s’accrocher contre les guerres, les injustices, le racisme, le changement climatique« .

L’importance de la femme dans le domaine de la littérature.

Les femmes et la littérature cohabitent difficilement en Afrique de l’ouest. En effet, les écrivaines ont donné chacune les raisons qui empêchent les femmes de jouir grandement de leur potentiel en matière de littérature. Elles ont évoqué le manque de confiance de la part des femmes africaines. Ces dernières ont le désir de prendre la plume, mais la volonté et le courage pour faire aboutir leur dessein font défaut.

De plus, les femmes en Afrique francophone ne disposent pas d’assez d’espace et de solitude pour écrire. Les femmes sont astreintes à de multiples occupations familiales, qui limitent parfois leur génie créatif. Je peux citer par exemple le ménage, les enfants, le mari qui occupent la majeure partie du temps de nos mamans africaines.

De même, elles ont évoqué les contraintes sociales, tels les baptêmes, les mariages, les funérailles. En Afrique, les évènements sociaux sont importants et la présence de tous est fortement sollicitée, surtout celle des femmes.

Seulement, l’écrivaine doit mûrir ses idées et parfois dans le plus grand calme. Elle doit être à l’affût d’événements qui pourraient nourrir sa créativité et respecter le calendrier qu’elle s’est fixé pour répondre aux attentes de ses lecteurs. Cela est très important pour garder une crédibilité à leurs yeux, car nous existons grâce à eux.

L’existence d’une littérature féminine

Pour l’autrice Monique ILBOUDO, « Le jour où l’on parlera de la littérature masculine, là on parlera de la littérature féminine. Pour l’instant, c’est la littérature tout court« . Sur le coup, je souriais après sa réponse, mais j’ai apprécié. Effectivement, je constate que les gens ont tendance à vouloir féminiser certains domaines d’activités et masculiniser d’autres. Pourtant, l’objectif recherché ne doit pas être l’instauration d’une différence, mais d’une universalité. Les femmes et la littérature partagent les mêmes liens lorsque je dis les hommes et la littérature. Il n’y a pas de différence, car c’est un être pensant qui écrit.

Les mots n’appartiennent à personne. Lorsqu’ils sont prononcés dans la foulée, rare sont les personnes qui cherchent à savoir s’il s’agit d’un homme ou d’une femme. Tout simplement parce qu’on reste focalisé sur le sentiment créé par les mots de la personne. Et c’est pour cette raison que l’écrivaine Roukiata OUEDRAOGO affirme que l’on peut guérir avec des mots, mais également que l’on peut blesser avec des mots.

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