Le retour de ma dame de fer
Les années passèrent après le départ de ma dame de fer pour la Cote d’Ivoire. Le fait d’avoir retrouvé ses proches remplirent son cœur de joie et la convainquit d’y rester. Plus rien ne la retenait au Burkina Faso. En effet, son mari était décédé depuis des années, ses enfants devinrent grands et autonomes, le marché de la boisson locale se rarifiait et le poids de l’âge se faisaient de plus en plus ressentir. Pour combler donc le vide crée par son absence, nous passions notre temps à nous appeler et à se donner des nouvelles. Rien ne laissait présager le retour de ma dame de fer.
Cependant, en 2018, le retour de ma grand-mère au Burkina Faso était imminent. Après nous avoir fait ses aurevoirs en 2011, elle ne percevait plus la pension de son défunt mari. Ma mère tenta à différentes reprises des démarches, afin que l’Ambassade de la Cote d’Ivoire au Burkina Faso, puisse transférer la pension directement en Côte d’Ivoire. Mais les différentes démarches furent vaines. L’agent chargé du dossier lui fit savoir, que la présence de l’intéressée était obligatoire pour apposer sa signature sur les papiers. Ma mère se trouvait dans l’impasse. En effet, elle ignorait la formule à utiliser pour convaincre ses ainés de la nécessité du retour de ma dame de fer aux pays des Hommes intègres. Mes oncles étaient contre son retour peu importe le motif avancé.
Pour cela, l’un d’entre eux fit le voyage et vint se renseigner. Il avança même les raisons de santé de ma grand-mère, pour justifier le fait qu’elle ne pouvait prendre aucun moyen de transport terrestre. L’agent lui dit, qu’il était désolé de l’apprendre et qu’il lui souhaitait une meilleure santé, mais sa présence était obligatoire pour débloquer l’argent. Que faire ? Mes oncles disposaient de peu de ressources financières pour s’acheter un billet d’avion. Ils se mirent donc à réfléchir à des solutions, mais sans issues. Trois années passèrent à leur insu et ils ignoraient la meilleure démarche à emboiter. Ils décidèrent donc de demander l’avis de ma dame de fer. Cette dernière accepta de revenir.
En janvier 2020, ma mère se rendit en Côte d’Ivoire et revint avec elle. Ma dame de fer s’installa chez nous et pas dans la cour de son défunt mari. Une situation qui suscita des remue-ménages. En effet, la majorité disaient qu’elle devait déposer ses valises dans la cour familiale avant de s’installer là elle voulait après. C’étaient inconfortable comme situation. Ne sachant pas pourquoi, les gens de la famille étaient contre, je demandai la raison à ma génitrice. Celle-ci me fit savoir, que traditionnellement une femme ne doit pas recevoir sa mère chez elle et surtout pas chez le beau.
J’étais surprise par sa réponse, car je me dis que l’être humain devait être au-dessus de certaines pratiques, qui ne l’honorait pas. A partir du moment où elle avait sa fille, le problème ne devait pas se poser. Malheureusement, je remarquai que rares sont les personnes qui se déplacèrent à notre domicile pour lui transmettre leurs salutations. Elle fut en colère les premiers jours, mais finit par accepter. Durant son séjour, elle s’occupait des papiers à fournir à l’agent. Aussi, elle profitait de la présence de ses petits-enfants et se reposait. Au bout d’un mois à faire des allers-retours à travers la ville de Ouagadougou, de patience et d’abnégation, l’argent de son défunt mari était à présent dans ses mains. « Tout cet argent est-il à moi ? A son vivant, il ne m’a même achetée un vélo. Aujourd’hui, tout cet argent m’appartient. Dieu est grand ! », dit-elle tout émue.
Au final, elle décidait de repartir dans son pays natal. Sans plus tarder, ma mère prépara leur départ pour Abidjan les jours qui suivirent. La main tendue en l’air, je lui dis au revoir pour la seconde fois.